Salut Sébastien, peux-tu te présenter à la communauté Dr. Clutch, ce que tu fais aujourd’hui, ton parcours?
Je m’appelle Sébastien Morin, breton d’origine, je suis préparateur physique depuis 15 ans spécialisé dans le basket. Ma particularité c’est que j’ai fait aussi bien du travail auprès de clubs professionnel que du travail individualisé auprès de joueurs. J’ai commencé au Cholet Basket où j’étais responsable de la préparation physique aussi bien du centre de formation que de l’équipe professionnelle, on a travaillé jusqu’en 2010 avec pas mal de succès.
L’autre chose à signaler, c’est que Cholet Basket est un des premiers clubs de Pro A à avoir engagé un préparateur physique à temps plein à l’époque. Après une première saison test, Cholet a voulu investir sur moi au côté de Erman Kunter, Jim Bilba et Jean-François Martin. Il y a eu une vraie dynamique que l’on a créée pour la préparation physique, l’amélioration de la salle de musculation, on s’en est bien sortie. On a eu de beaux parcours (finale de coupe de France, finale d’Eurochallenge, vainqueur de la semaine des As) et surtout un titre en Pro A en 2010, qui a permis au club de découvrir l’Euroligue.
Mais la plus grande fierté de cette période, c’est la formation de quatre joueurs qui sont partis aux USA en NBA, Rodrigue Beaubois, Kevin Séraphin, Nando deColo et Rudy Gobert. Tout ça a éveillé la curiosité de Mike Brundgardt, préparateur physique des Spurs de San Antonio et très proche de Tony Parker.
Je l’ai rencontré à l’issue d’un stage où il questionnait la qualité de la formation à Cholet, on a pu discuter et on était en accord sur pas mal de points à l’époque sur la philosophie de l’entrainement. Étant vraiment fan de ses méthodes à l’époque, j’ai accepté de suivre ses entrainements en 2009, donc c’est ma première expérience dans une structure NBA, assister à un Team Building de Gregg Popovich, aller dans la salle d’entraînement des Spurs, ce fut génial.
Cependant, dans le deal il n’y avait pas forcément une promesse particulière, on m’aidait à progresser dans le métier, être en charge de quelques processus, mais à la fin, il n’y aurait rien pour moi. Bon l’échange n’était pas comme ça, mais indirectement c’était ça.
Finalement j’ai accepté cette opportunité aux USA, car c’était un rêve et je me suis dit que de toute façon j’aurai de nouveau ma place dans les clubs en Europe. Et à ce moment-là, il y a un Kevin Séraphin jouant à Washington, en méforme, qui a du mal à pouvoir s’intégrer et blessé en plus, qui m’avait appelé pour que je puisse m’occuper de sa réathlétisation pendant quelques semaines et avoir un contact français durant cette période.
Finalement, ces deux semaines se sont transformées en huit ans. Je suis devenue son coach privé physique à temps plein, 7/7 24h/24, je suis devenu un peu le manager de la performance de Kevin jusqu’en 2018. Il y a eu la période Washington puis New York Knicks, qui était la période la plus compliquée, et la fin aux Indiana Pacers. Puis il a ensuite tenté sa chance au FC Barcelone et on a décidé d’un commun d’accord d’arrêter notre collaboration.
En parallèle, j’ai accepté une proposition de Erman Kunter à Galatasaray pour que j’intègre le pôle de préparateur physique, on était trois en tout, ce qui montre le niveau de professionnalisme et les moyens donnés en Turquie pour le basket. Mon rôle était de m’occuper de l’équipe première, mais aussi d’apporter mon expérience et ma philosophie d’entrainement aux autres préparateurs. Puis depuis deux ans, je m’occupe de Rodrigue Beaubois qui m’a contacté, car il avait des blessures récurrentes au pied, notamment des tendinites rotuliennes.
J’ai évolué dans mes méthodes de coaching grâce à toutes ces expériences, je commence à développer le coaching hybride, où on développe des conseils avec le joueur à ses côtés, mais aussi à distance. Et en plus de tout ça, je me suis diversifié, je travaille en exclusivité pour la société Klaxoon qui fait partie du Next40. J’ai créé ma société Band of Strivers également dans le coaching et la préparation physique avec une plateforme interactive.
Comment juges-tu l’évolution du rôle de préparateur physique au sein des clubs, auprès des joueurs?
C’est ce point que je voulais personnellement mettre en avant. Un coaching à 360degrés, on prend tous les paramètres qui semblent intéressants dans l’analyse pour l’athlète. En plus, le terme de «préparateur physique» est flou, car en vérité il n’y a pas de statut officiel: cela veut tout dire et ne rien dire à la fois. Un préparateur physique peut être aussi bien un coach de fitness que moi. Dans le haut niveau, on cherche surtout la performance, c’est ça qui nous différencie, c’est ce détail, on ne peut pas résoudre le travail de la performance que par la musculation, le cardio ou le travail des appuis.
C’est tout ça que l’on a mis en place avec Kevin Séraphin, avec nos contacts quotidiens, pour bosser l’aspect mental, nutritionnel, la vue, la posture et toute la gestion avec l’entourage du joueur. On devient davantage un manager de la performance qu’un simple préparateur physique. Notre rôle est davantage de permettre au joueur de ne penser qu’au terrain, au basket, à son jeu, à sa carrière.
C’est pour ça qu’il faut avoir de multiples cordes à son arc pour réussir dans ce métier, être ouvert à de nouvelles méthodes, et dernièrement je développe beaucoup la question du sommeil dans la performance et ce n’est pas si simple à développer et à questionner. Il y a l’hyperactivité, le stress post-match ou avant la rencontre, il y a une méconnaissance de ces sujets et qui peut aussi expliquer le manque de performance pour un athlète. Tous ces sujets, j’essaie de l’aborder avec les joueurs que je conseille.
Entre un coaching individualisé avec Rodrigue actuellement, Kevin Séraphin et tout un pôle de joueurs au sein d’un club professionnel, y’a-t-il nécessairement des différences dans l’élaboration des exercices ou au contraire des tunnels, des basiques que tu déclines selon le contexte?
Il y a des différences notables, typiquement quand on coache un seul joueur, on s’occupe et l’on priorise un seul joueur, tandis que dans une équipe on a 15 joueurs à faire travailler. Quand tu es préparateur physique d’un club, ton objectif est que chacun arrive à performer sur un plan athlétique global avec les contraintes que l’on connaît en termes de temps, de relation avec le staff technique.
Tandis que coach privé on travaille essentiellement sur les détails auxquelles le basketteur n’a pas eu le temps de travailler avec les préparateurs physiques des clubs. Car on est constamment en interaction avec les clubs et le joueur pour travailler certains points. J’essaie en permanence d’éviter des ambiguïtés, pour moi dans cette situation c’est le club qui décide de ce qu’il veut travailler avec le joueur, que ce soit une franchise NBA ou l’Efes Istanbul aujourd’hui, moi je ne viens qu’après dans le process, c’est eux les boss (rires).
Il y a tellement de choses à gérer pour les clubs, les joueurs, avec les matchs, les déplacements, l’extra sportif… c’est ce que j’offre aux clubs, en travaillant ces détails avec un joueur en particulier.
Par exemple, on a travaillé avec Rodrigue la qualité du sommeil, des choses qu’un club n’a pas le temps de suivre, développer. Mon rôle est de compléter tout le reste du travail à réaliser, car j’ai ce temps, cette possibilité de le faire.
Pour revenir à la question, elle est là la difficulté de gérer 15 joueurs dans un club pour un préparateur physique, tu ne peux pas tout faire pour avoir une préparation parfaite. Quand on fait appel à un coach privé, c’est qu’il y a forcément un manque qui a été repéré par le staff, le joueur même. Pour parler encore de Rodrigue quand il m’avait appelé, il m’avait dit honnêtement, « Avant je n’aurais pas eu besoin de faire appel à toi, car j’avais tout le nécessaire avec le club ».
Tout dépend de la philosophie d’entrainement des clubs, des moyens qu’ils vont disposer à leurs préparateurs physiques. Là où d’autres clubs vont plutôt privilégier la qualité et le «CV» du joueur, qui coutera plus cher et donc ils demanderont des efforts supplémentaires à ce joueur pour engager des coachs privés, faire des exercices en complément, car ce dernier a les moyens de faire appel à un préparateur physique à plein temps.
Tout dépend aussi du club auquel le joueur est salarié, l’exigence au quotidien n’est pas la même entre les Spurs par exemple, élite sur la préparation physique et mentale des joueurs et Washington qui consacre des budgets sur d’autres plans. Kevin n’aurait peut-être pas fait appel à moi s’il était drafté aux Spurs selon moi.
Surtout que pour un joueur, c’est de nouveau une charge de travail supplémentaire qui s’inflige d’une certaine manière? Notamment pour Rodrigue qui a connu beaucoup de blessures durant sa période en NBA.
Avec l’âge on comprends que son corps a de plus en plus besoin de précision dans l’entraînement et que le seul talent ne suffit pas. Rodrigue, je le suis depuis les années Cholet , donc je connais l’évolution, on avait fait une tentative de coaching privé à l’époque ou il était à Dallas. On a fait toute une off-season ensemble et il était en très grande forme mais malheureusement il n’y a pas eu de continuité à cause du calendrier. Je vivais à Washington pour Kevin donc il n’y avait pas possibilité de continuer l’expérience.
Mais à l’époque il n’avait pas cette vision qu’une personne de l’extérieur puisse l’aider dans sa carrière. Et là où j’ai de l’admiration pour Rodrigue, c’est quand il fait appel à moi il y a deux ans, il a déjà 32 ans, et il pourrait se penser dans une pente descendante, dans le déclin. Et non : il s’inflige du travail supplémentaire, en mode « j’ai besoin d’un mec comme ça, je veux rester dans le haut niveau et pour cela j’ai encore besoin d’investir pour être toujours performant».
Pour faire un bilan des deux années qu’on a passé, il n’a eu aucune blessure musculaire, les seuls soucis physique étaient à l’œil à la suite d’un contact et le COVID, donc des choses que l’on ne peut pas prévoir quand on est préparateur physique ou joueur : c’est quand même extrêmement positif.
Ces statistiques personnelles sont encore très bonnes et collectivement il a connu une saison exceptionnelle. Ce qui fait qu’il y a une différence par rapport à ces années Dallas, ce n’est pas uniquement notre collaboration, c’est qu’il a eu la volonté de s’entourer de quelqu’un d’extérieur, que ce soit avec moi ou une autre personne. Dans sa mentalité il a eu un déclic, qui le responsabilise pour rester performant, car avec cet investissement il ne peut pas «déconner», il ne veut pas que cela devienne de l’argent perdu.
Tout ça c’est un déclic, de rester sérieux pour continuer à être performant et de réaliser qu’on a besoin de quelqu’un d’extérieur pour continuer à travailler, avec l’exigence des clubs et de la compétition.
Avec toutes les évolutions technologiques liée à la santé, penses-tu que l’on peut désormais prévoir les blessures?
C’est vrai, la plus grosse avancée en termes de préparation, c’est la technologie. Quand j’ai commencé, tout était rudimentaire sur ce point par rapport à aujourd’hui. Moi je peux prévoir le niveau de forme du basketteur, la récupération, la qualité du sommeil, la quantité du sommeil et surtout l’effet du stress sur le corps, et c’est vraiment très intéressant à étudier.
On ne peut pas nécessairement anticiper la blessure, on ne peut pas le prévoir malheureusement et ce malgré toutes les choses mises en place. Mais je commence à voir une corrélation entre le stress et la blessure, souvent dans les discours avec les joueurs que je coache ou que je connais personnellement et qui ont connu une blessure, je leur pose toujours cette question «Qu’est-ce qui se passe dans ta vie ces trois dernières semaines ? ».
Et très régulièrement avant la blessure, il y a eu des petites difficultés, un décès, une empoignade verbale avec sa copine, des problèmes financiers, quelque chose qui a perturbé l’athlète. Malgré tout ce qui a été mise en œuvre dans la préparation physique, quand quelque chose qui perturbe l’âme de l’athlète, son mental peut aussi être une source de blessure potentielle.
Et c’est là où on entre dans une préparation mentale dans l’élaboration des programmes, tout est lié entre la technologie, la préparation physique et le travail mental que l’on va effectuer. On doit s’adapter, savoir quand il faut travailler, prendre du repos.
Cela m’est arrivé quand le joueur n’était pas très bien, de ne pas s’infliger une séance supplémentaire physique et on va travailler l’aspect mental, se relaxer en mode «fuck les entraînements, on va aller boire un verre ensemble, tu n’es pas apte pour t’infliger une autre préparation physique dure, on va aller rigoler un peu, se vider la tête».
Les blessures peuvent arriver, on est jamais à l’abri, il ne faut pas tout le temps surinterpréter, le prendre personnellement. C’est facile de dire «il est blessé parce qu’il n’est pas sérieux, son préparateur physique n’est pas bon», c’est bien plus complexe que ça. Il y a beaucoup trop de paramètres qui peuvent expliquer une blessure, on ne peut pas l’empêcher à 100%. Notre rôle est de réduire ces paramètres.
D’une certaine manière tu rejoins un peu l’avis de quelques spécialistes de la préparation mentale qui viennent contester le simple lien expliquant le succès, la réussite du « no pain= no gain»?
Oui la préparation physique et mentale, ce n’est pas si simple que ça. On me pose souvent la question « combien de séances d’entraînement tu organises avec le joueur », je leur réponds un peu ironiquement « je leur mets cinq voire six entraînements par jour » (rires)… La question est normale, mais sincèrement je leur réponds la plupart du temps que je n’en ai aucune idée.
Il faut tester le joueur, il y a toute une batterie de tests et à partir de là on peut juger de quel entraînement est nécessaire ce jour-ci, cette semaine-là. On essaie de travailler avec efficacité et précision et pas sur le mythe de la souffrance. Avec tout ce que j’ai à ma disposition, selon le profil du joueur, parfois trois séances individualisées permettra d’optimiser la performance.
Restons sur les trois séances avec du sérieux, de la qualité et cela peuvent suffire. D’autres profils qui ont des capacités de récupération plus importantes peuvent réaliser cinq voire six séances supplémentaires en plus des entraînements avec le club, car il a besoin d’aller plus en profondeur sur des choses. Le fait de moins s’entraîner en amont n’est pas synonyme de fainéantise, mais parfois il y a des paramètres qui peuvent expliquer le fait que deux séances par semaines supplémentaires peuvent suffire, et qui vont définir la fréquence d’entraînement.
Pourquoi préparateur physique spécialement dans le basket?
La relation que j’ai avec le basket, elle est bien évidemment familiale. Mon arrière-grand-père fut un des créateurs d’un des gros clubs rennais, la Rennes PA, il a été président du club. Mon père a joué en N3, N2, donc tout naturellement j’allais voir mon père jouer et c’est là qu’est venu ma passion du jeu. Mais au départ je préférais pratiquer le Volley parce que j’adorais le dessin animé Jeanne et Serge à la télé (rire). Mais bon dans la section où j’étais il n’y avait pas d’équipe de Volley donc j’ai finalement choisi le basket.
J’ai commencé à faire du basket à l’âge de sept ans, j’ai fait des matchs niveaux départementaux, régionaux, j’ai atteint le niveau N3 assez jeune. Mais bien sûr la génération Jordan et compagnie a aussi était un déclic dans ma passion pour la balle orange. La NBA sur Canal Plus, tout cet univers là m’a marqué.
C’est le sport qui me fait le plus vibrer, le final four gagné par l’Efes je l’ai vécu de l’intérieur avec Rodrigue et j’étais comme un supporter, un dingue dans les tribunes. Alors oui, travailler dans le foot, le rugby, c’est possible et pourquoi pas d’ailleurs, mais sincèrement je m’éclaterai moins.
Je pense pas personnellement avoir les mêmes émotions devant un match de finale de Champions League au football. Je connais les enjeux du basket, j’ai pratiqué à mon maigre niveau et ça fait tellement longtemps que je travaille dans le basket, que c’est devenu mon truc quoi, rien ne remplacera le basket et il a fallu que je me batte pour arriver jusque-là.
Comment juges-tu l’évolution de la préparation physique dans le basket français, plus particulièrement dans les clubs professionnels?
Il y a eu une prise de conscience c’est clair, une évolution des mentalités. Maintenant il y a de plus en plus de club qui ont des préparateurs physiques, mais pas tous, car il y a toujours des clubs qui sont en retard sur ce point. Maintenant dans mon discours, et avec modestie, en tant que préparateur physique, j’ai vécu le très haut niveau, avec la NBA, l’Euroligue. Donc je ne peut pas me contenter d’une communication du genre, « on a un préparateur physique et une salle de musculation etc».
Mais à côté de ça, il faut voir le véritable rôle du préparateur physique dans ces clubs, si c’est simplement de l’image, et qu’il intervient très rarement, où est-il un élément important de l’entraînement de l’équipe?
La deuxième chose, c’est les moyens à la disposition du préparateur offert par le club, avec quoi il travaille? Car c’est bien d’avoir un préparateur physique, mais si le club n’a pas les installations et qu’il faut transporter une barre sur le parquet pour préparer les joueurs, et j’ai connu cela, tout de suite mon sentiment est que c’est pas possible.
Pour avoir une préparation optimale ce n’est pas simplement une question d’argent. Avec très peu on peut faire du très bon boulot. Je ne compare pas à la NBA où des très gros club où là, les moyens, les ambitions sont colossales, je parle juste d’une base à avoir. Avoir un matériel qui soit adapté aux basketteurs et non achetés, dans la salle de musculation du coin, parce que ce n’est pas adapté aux joueurs et c’est inutile.
Alors oui il y a un progrès, c’est évident, mais la marge de progression réside plutôt dans les à-côtés, les moyens donnés au préparateur physique, l’importance qu’on donne au préparateur physique, les moyens financiers à sa disposition et le matériel disponible. On va vers ça, Paris Basket par exemple qui viennent de monter, ont cette chance de pouvoir se préparer à la salle One Ball, les conditions là sont idéales.
Dans les meilleurs souhaits, il faudrait que tous les clubs puissent bénéficier de structure similaires, pas une salle à la One Ball, mais quelque chose de fonctionnelle pour que tous les acteurs, préparateur et joueur puissent bosser. Des joueurs m’ont montré leur structure où ils bossaient, on pourrait presque dire qu’il bosse dans le grenier (rire).
On dit souvent au joueur, il faut être pro, sérieux, mais là dans ce cas présent comment tu peux travailler dans ces conditions? Il faut donner les moyens aux joueurs pour ensuite être exigent avec eux.
Kevin Séraphin, intérieur, Rodrigue Beaubois poste 1-2 … Adaptes-tu tes entrainements en fonction du poste, des besoins physiques et de la morphologie du joueur?
Même quand j’étais en club, il faut réussir à individualiser les entraînements, tu ne peux pas réaliser des programmes communs à tous les joueurs de haut niveau. Il y a une individualisation à travers le poste, l’âge, la morphologie et dans la dimension du joueur.
Par exemple, Rodrigue à de très grands segments notamment au niveau des bras et fémur alors que Kevin Séraphin, pourtant plus grand, bénéficiait de segment plus «naturel» par rapport à sa taille.
À partir de là, il y a des exercices qui vont varier, différencier, des choses que je vais faire avec Rodrigue que je n’ai pas fait auparavant avec Kevin, il y a aussi l’antécédent de la personne, les blessures passés, j’ai beaucoup travaillé auprès de Rodrigue qui manquait de mobilité de poignet à cause de blessures, on a donc adapté beaucoup d’exercices notamment les mouvement haltero.
Il y a beaucoup de choses en considération en plus du poste, et pour moi il y a une des plus importantes, où ils en sont dans leur carrière, leur faim. On a eu une longue discussion avec Rodrigue après le Final Four, et je lui ai dit «écoute tu as tout fait, tu as été champion NBA, Euroligue, MVP des finales du championnat turc, tu as faim ou pas ?». Est-ce qu’il a envie d’aller plus loin, de continuer la collaboration et encore travailler les détails, et la réponse était cool puisqu’il a encore faim, il est ultra motivé, car il sent qu’il peut encore aller plus haut.
Il y a un dernier facteur à prendre en considération, où j’ai toujours un peu de retard, c’est la vie familiale, rarement on prend en considération ce facteur. Kevin était célibataire, tandis que Rodrigue lui est papa de deux filles en bas âge, la gestion est complètement différente. Il faut alors trouver l’équilibre entre ma présence, le calendrier des entraînements et la vie familiale. Alors que si le joueur est célibataire, il n’a que son propre emploi du temps à gérer, donc il faut absolument prendre en compte.
Il y a des moments où on aimerait bosser encore plus dans le temps avec le joueur, mais il a des impératifs familiaux et c’est dans ces moments là où il faut avoir la capacité d’aller à l’essentiel, trouver tout de suite les choses à travailler pour ne pas perdre de temps, chercher ce qu’il a besoin et pas plus.
Merci beaucoup Sébastien ! Pour finir, tu as carte blanche ; des projets, ou initiatives à nous présenter ?
Par quoi commencer! Déjà ma première préoccupation, c’est de savoir quand est ce que je pourrais retourner aux États-Unis cet été. Rodrigue est à Dallas actuellement, car il est résident là-bas et c’est encore compliqué de s’y rendre avec les restrictions, etc. La situation s’améliore donc il y a des possibilités, je vais bientôt être vacciné donc normalement je devrais pouvoir y aller, donc dans un très court terme ma préoccupation elle est là.
C’est très important, car nous avons l’off-season à préparer, et on veut que ce soit une très bonne préparation, car c’est la première de qualité que nous ferons ensemble, cela fait depuis un moment qu’il en avait plus fait. Il y a deux ans, il m’avait appelé en fin d’off-season, l’année dernière on connaît tous la pandémie et ses conséquences, des salles fermées, le confinement, on a du se débrouiller comme on pouvait. C’était littéralement du bricolage, du bon bricolage certes, mais ce n’est pas forcément ce qu’il y a de mieux.
Par contre je ne vais pas te le cacher, le terrain me manque, retrouver un club de très haut niveau, un nouveau projet, c’est dans mes projets, je discute avec des dirigeants et j’ai désormais des exigences à la différence de mes débuts il y a 15 ans. J’ai de solides expériences, j’ai encore des choses à prouver, en France ou à l’étranger.
J’ai également ma société que je souhaite développer encore, en faire une plateforme globale de préparation physique et mentale, c’est un projet qui me tient à cœur.
Mon objectif ce n’est pas d’envoyer des PDF ou des consignes toutes simples. Je veux sensibiliser l’athlète ou l’individu lambda à la préparation, à «s’auto-éduquer». Faire quelque chose de vraiment interactif dans lequel je veux responsabiliser la personne par rapport à ses entrainements, lui donner les outils pour qu’ils puissent s’évaluer afin d’adapter son programme, donner ses armes à chacun pour qu’il puisse se développer.
Cela fait cinq ans que je suis dans ce projet et j’essaie au maximum d’améliorer encore plus le procédé de développement physique et mental à distance. Je pense que tout cela va être lancé autour de septembre, octobre.
Et puis pour finir sur une note de fun, un projet qui me tient à cœur, ce serait de faire Rennes jusqu’au Mont Saint-Michel en vélo (rires)… en aller-retour. Je me suis mis au vélo depuis janvier et je suis devenu accro, j’enchaîne les kilomètres et j’aimerais aller vers les 150km ce qui serait mon record.